mardi 28 septembre 2010

Oui, il y a des stéréotypes en publicité. La preuve.

Il y a bien des années que nous clamons que la publicité regorge de stéréotypes. Il est surtout question ici du rôle de la femme, de la manière dont elle est mise en scène dans diverses publicités. Précisons que nous entendons par stéréotypes un ensemble d’attributs, de caractéristiques qui différencient les hommes des femmes. Il y aurait quatre grandes catégories de caractéristiques : caractéristiques physiques, rôles (leader, prendre soin des enfants, etc.), occupations (mère à la maison, camionneur, etc.) et traits (souci des autres, etc.). Toutes ces caractéristiques sont associées, à des niveaux différents, soit aux hommes, soit aux femmes.
Une récente étude a analysé plus de 60 recherches sur la question, ces recherches portant sur des publicités télé et radio. Est-ce que la situation a changé au fil des ans ? La représentation des hommes et des femmes reflète-t-elle la place qu’ils occupent aujourd’hui ? Une vision plus pessimiste soutient que la situation est pire que jamais et que la femme est toujours aussi stéréotypée. Les optimistes, de leur côté, constatent plutôt que les femmes gagnent du terrain par rapport aux hommes et qu’elles sont de moins en moins stéréotypées.
Premier constat, même s’il paraît évident : oui, la publicité contient des stéréotypes. Deuxième constat : les stéréotypes sont particulièrement présents lorsqu’on présente la femme dans ses occupations ou dans divers métiers. La femme a gagné du terrain à ce niveau depuis plusieurs années mais cette réalité ne semble pas dépeinte dans la publicité. On la présente encore beaucoup de manière traditionnelle. Aussi, les résultats de l’analyse indiquent que la publicité demeure le reflet de ce qui se passe dans la société. Elle n’est donc pas un acteur important des changements qui se passent autour de nous. Elle agit davantage comme un miroir. Les gouvernements qui voudraient limiter les stéréotypes en publicité pour l’influence qu’ils paraissent exercer se trompent sans doute de cible.
L’analyse montre également que la femme est plus souvent que l’homme :
1)      Présentée sans prendre la parole, muette
2)      Dans un rôle de soumission, de dépendance
3)      Présentée dans un environnement domestique, à la maison
4)      Associée à un ou des produits domestiques
      C’est vrai que cette analyse ne semble pas nous en apprendre. On se doutait bien que ces stéréotypes existaient en publicité. Mais elle a le mérite de confirmer, pour une première fois, ce que nous croyions en quantifiant le nombre de stéréotypes véhiculés.
      Source: Eisend, Martin (2010), «A Meta-Analysis of Gender Roles in Advertising», Journal of the Academy of Marketing Science, 38.

   
     

mardi 21 septembre 2010

Publicité sur le web : au lieu du taux de clic, parlons donc de fréquence

Dans notre course effrénée pour la mesure, on a d’abord cru que le clic était une bonne manière de juger l’efficacité d’une publicité web. Mais il est clair aujourd’hui que le taux de clic est loin d’être une mesure fiable. Malheureusement, des gestionnaires et des représentants publicitaires ont encore recours à lui.
Que l’on clique ou non, la publicité fait son travail. On s’entend aussi pour dire que la fréquence est nécessaire pour atteindre un certain niveau d’efficacité. Mais nous connaissons peu de choses de la fréquence publicitaire sur le web. Nous croyons depuis longtemps, pour la publicité dite traditionnelle, que la fréquence d’un message contribue au rappel et à la reconnaissance d’une marque en enfonçant bien l’information dans notre mémoire, allant même jusqu’à améliorer l’attitude envers la marque. La répétition rendrait l’information plus accessible lorsque vient le temps, par exemple, d’acheter un produit. En 1972, Krugman soutenait qu’une publicité atteint son maximum d’efficacité à sa troisième diffusion. Les diffusions subséquentes ne contribuant aucunement à une meilleure efficacité. C’était son point de vue.
Mais qu’en est-il sur le web ? La fréquence y joue-t-elle le même rôle ? En 1999, une étude révélait qu’une bannière répétée sur plusieurs pages web peut améliorer la mémoire que la marque soit connue ou peu connue. Et récemment, une autre étude apportait un éclairage supplémentaire. 250 personnes, âgées de 18 à 37 ans, ont navigué sur des sites fictifs de nouvelles sur lesquels se trouvaient des bannières. Les résultats ont démontré que la fréquence a un impact positif sur le rappel mais pas sur la reconnaissance, même si nous ne sommes pas très loin du résultat significatif dans ce dernier cas. Il en va de même pour l’attitude envers la marque. Le résultat est pratiquement significatif, indiquant qu’il faut pousser la recherche plus loin. Finalement, la fréquence a un impact positif sur l’intention d’essayer le produit (trial intention). Il faut préciser qu’en général les spécialistes s’entendent pour dire que la fréquence peut avoir un impact sur l’attitude envers la marque, envers la publicité et sur l’intention d’achat. Mais ceci reste à démontrer plus solidement dans le cas de la publicité sur le web.
Oublions donc, pour le moment, le taux de clic et concentrons-nous sur d’autres éléments qui aideront plus précisément à mesurer l’efficacité d’une campagne même si cela demeure tout un défi…

Source: Lee, Sang Yeal and Yong-Suk Cho (2010), «Do Web Users Care About Banner Ads Anymore ? The Effects of Frequency and Clutter in Web Advertising», Journal of Promotion Management, 16, 288-302.



jeudi 16 septembre 2010

Les marques en perte de contrôle

Depuis mardi, en Europe, Google AdWords permet à tout annonceur de miser et d’utiliser un nom de marque qui n’est pas le sien. Vous êtes une boutique et vendez du Lacoste ? Vous pouvez utiliser la marque pour annoncer votre commerce. Donc, Google peut-elle afficher votre publicité si le nom d’un tiers est entré pour une recherche ? Une telle politique soulève actuellement un mini tollé là-bas. L’Union française des annonceurs s’inquiète des dérives possibles et exprime un malaise de voir un tiers «acheter»  littéralement une marque qui ne lui appartient pas. En Amérique du Nord, Google permet cette pratique depuis 2004. Les annonceurs d’ici ont-ils subi des préjudices ? Le groupe LVMH s’inquiète de la confusion possible que cela pourrait créer dans la tête des consommateurs quant à la provenance et la qualité des produits, notamment. Mais un jugement de la Cour européenne de justice donnait raison à Google en mars dernier.
Google rétorque qu’une telle façon de faire favorise plutôt le consommateur en rendant disponible une plus grande offre de produits, plus de commentaires, etc. Et qu’elle fait tout pour combattre la contrefaçon et sa promotion.
Gérer une marque, c’est un combat. En sommes-nous au point où elles doivent accepter les nouvelles règles du jeu qui impliquent nécessairement une perte de contrôle ? Doivent-elles modifier leur manière de considérer les choses ? Il semble bien que oui.  

mercredi 15 septembre 2010

L'utopie de la mesure

Mesure, mesure, mesure. L’avènement des nouvelles technologies a rendu les données plus accessibles que jamais. On croit donc que la mesure est plus facile, plus simple. Erreur. Des obstacles majeurs se dressent encore devant nous et ils se trouvent essentiellement dans les entreprises. Ce n’est pas parce qu’une pléthore de données est disponible que les organisations savent quoi en faire. Sans compter que la volonté est loin de toujours y être.
Une étude, réalisée aux États-Unis auprès de 400 entreprises de 100 employés et plus, révèle que la moitié d’entre elles place la mesure comme étant prioritaire. La mesure du ROI, par exemple. Il y a certes aujourd’hui un intérêt plus soutenu pour la mesure de ses activités et de ses performances, mais nous sommes encore loin de la coupe aux lèvres. En fait, moins du quart de ces entreprises croit qu’elles excellent dans la mesure et dans l’amélioration des activités marketing. Et un quart seulement admet que ses activités de mesure sont pleinement intégrées à sa planification marketing.    
Les entreprises semblent donc avoir de la difficulté à traduire la mesure et ses résultats en actions concrètes. Les causes ? Elles peuvent être nombreuses mais la principale demeure sans doute le manque de volonté de la direction. Sans cette volonté, les ressources financières et humaines ne sont pas déployées. Il est donc impossible de maximiser les activités marketing de l’organisation. Quoi faire ?
1)      Obtenir l’appui de la haute direction ou d’au moins un de ses membres. 71% des entreprises ayant les meilleures performances ont un appui soutenu de la haute direction. Si ce n’est pas le cas, travailler pour convaincre qui de droit avec des exemples concrets, de la veille, du «benchmark».

2)      Les organisations les plus performantes sont celles qui réussissent à bien relier les objectifs marketing aux objectifs généraux de l’entreprise. Il faut donc se parler entre départements et unités ! Et surtout, PLANIFIER.

3)      Investir dans le talent et les bons outils de mesure est aussi capital. Il faut maintenir un certain investissement dans les mises à jour, autant pour le personnel que la technologie.

4)      Partager les résultats provenant de la mesure avec les autres unités. Elles pourront s’en servir pour leur propre planification. Voilà une façon de justifier les investissements requis par l’équipe marketing….

Un intérêt pour la mesure ne se traduit donc pas automatiquement en résultats. La volonté doit y être. Les nouvelles technologies apportent un lot de données mais il faut cesser de croire qu’elles nous rendent la vie plus facile.

Source: Carr, J. Mark and Richard Schreuer (2010), «Connecting the Dots», Marketing Management, 19,2.



mercredi 8 septembre 2010

Les utilisateurs de Facebook narcissiques ? J'ai bien peur que oui...

Mini coup de tonnerre aujourd’hui dans la twittosphère. Les médias nous apprennent qu’une étude révèle que les utilisateurs de Facebook sont narcissiques et ont peu d’estime de soi, d’amour-propre. On crie même à une sorte de «Facebook bashing». C’est aller trop loin, évidemment.


Qui a vraiment lu l’étude ? Réalisée par une étudiante du département de psychologie de l’université York de Toronto, cette étude lève sensiblement le voile sur une réalité qui est en train de se confirmer, j’en ai bien peur. Une idée, de plus en plus acceptée en psychologie, suggère que les individus à l’estime de soi plutôt chancelante ont un penchant narcissique. L’auteure de l’étude rappelle ce qu’est le narcissisme: «Narcissism is a pervasive pattern of grandiosity, need for admiration and an exaggerated sense of self-importance». Les narcissiques vont utiliser leurs diverses relations pour nourrir leur popularité et leur succès. De l’autre côté, l’estime de soi peut se décrire comme l’auto-évaluation que nous faisons de notre valeur. Il est tout à fait normal de vouloir améliorer son estime de soi. Il s’agit d’un besoin presque vital. S’investir sur Facebook pourrait être vu comme une manière d’améliorer cette estime de soi puisque nous avons le quasi contrôle sur la façon de nous mettre en scène. Mais ceci reste à être démontré plus solidement.

L’auteure a eu recours à l’échelle de Rosenberg pour mesurer le niveau d’estime de soi de ses 100 répondants. Il s’agit sans aucun doute de l’échelle la plus crédible. Les résultats montrent que les répondants ayant l’estime de soi la plus faible sont ceux qui passent le plus de temps sur Facebook. Mais une autre étude contredit ce résultat. L’auteure souligne donc qu’il ne faut pas conclure définitivement. D’autres recherches sont nécessaires. Voilà ce qui n’a pas été nuancé dans la nouvelle d’aujourd’hui. Et à 100 répondants, il s’agit d’une étude exploratoire.

Et oui, il existe une corrélation entre narcissisme et temps passé sur Facebook. Un résultat aussi confirmé dans une autre étude publiée en 2008.

Notre utilisation des médias sociaux reflète sans doute qui nous sommes. Pourquoi les utilise-t-on ? Et à quelle fréquence ? Voilà des questions légitimes et très intéressantes pour des chercheurs. Et non, ce n’est pas du «Facebook bashing».

Source : Mehdizadeh, Soraya (2010). «Self-Presentation 2.0 : Narcissism and Self-Esteem on Facebook», Cyberpsychology, Behavior, and Social Networking, 13,4.

Internet plus influent que la télé...mais l'information sur les médias sociaux y est souvent sans intérêt (étude)


Partage-t-on trop d'information sur le web et les médias sociaux ? Une majorité de Français pense que oui. Une chose est sûre, on ne peut tout absorber. Mais Internet est considéré comme étant le média le plus influent, devant la télé et très loin devant la presse écrite. Ce n'est pas rien.

Lire les détails sur Stratégies.

mardi 7 septembre 2010

Il y aura toujours de belles femmes dans les publicités

Il y a de ces débats en publicité qui sont éternels. Le recours à la femme, à la belle femme, est certainement l’un de ceux-là. Mais j’ai bien peur que nous ayons dépensé toute cette énergie pour rien. Pourquoi les publicitaires ont-ils, encore aujourd’hui, recours à la femme pour vendre une marque ou un produit ? Parce qu’ils sont sexistes, misogynes, ou pire, arriérés ? Et si la réponse se trouvait plutôt au plus profond de nous même ?


En 1859, Darwin publie un ouvrage scientifique majeur : L’origine des espèces. Il y parle, notamment, de l’évolution et de l’adaptation des espèces à leur environnement. Une espèce, l’humain compris, qui ne s’adapte pas, crève, disparaît. Depuis 20 ans, il est généralement accepté que nos émotions et nos comportements sont aussi soumis aux règles de l’adaptation. Pour survivre, l’homo sapiens a dû s’adapter pour, entre autres, trouver un(e) partenaire, élever ses enfants et gérer ses relations sociales. Le courant dominant en science sociale veut que l’éducation et la socialisation servent à expliquer ces divers comportements. Mais ce ne serait pas le cas. Comme quoi l’humain ne viendrait pas au monde totalement vierge.

Le professeur Gad Saad de l’université Concordia a recours à la psychologie de l’évolution pour expliquer plusieurs phénomènes, dont l’utilisation de la femme en publicité. Nous savons que les hommes de toutes les cultures ont une attirance pour la femme plus jeune. Des recherches ont démontré cet état de fait. Et que la femme est attirée par un homme avec une certaine stature, un certain pouvoir. Ce n’est pas un cliché que d’affirmer ça. La femme plus jeune et l’homme affichant sa «virilité» sont perçus comme de meilleurs géniteurs, assurant ainsi la survie de l’espèce.

Les publicitaires, par une sorte d’instinct, auraient ainsi recours à la femme pour annoncer une marque ou un produit. C’est vrai que la beauté et le sexe attirent l’attention. Mais il a aussi été démonté qu’ils n’aident pas nécessairement à la compréhension du message. Ce n’est pas une recette gagnante à tous les coups. L’origine d’un tel comportement par les publicitaires serait donc ancrée très profondément. Rien à voir avec le désir, comme ont affirmé certains mouvements, d’asservir la femme et de l’exploiter indûment. Un publicitaire ne cherche qu’à vendre un produit, pas à partir en guerre. La représentation de la femme n’est que le reflet de nos préférences sexuelles les plus profondes. Par exemple, le cerveau d’un jeune homme réagit positivement à la vue d’un beau visage féminin, symétrique. Même chose à la vue d’une publicité contenant un stimulus sexuel.

La psychologie de l’évolution a plusieurs détracteurs, certains ayant de la difficulté à prendre tout ça au sérieux. Le sujet est évidemment trop vaste pour être totalement résumé ici. Mais elle apporte un autre point de vue, fort pertinent. Elle cherche à comprendre la raison d’être de nos comportements les plus enfouis. Je n'aborde pas ici l'aspect moral de ce type de publicité, ni l'encourage ou la dénigre. À chacun de juger. Les intéressés peuvent lire le livre de Gad Saad sur le sujet : «The Evolutionary Bases of Consumption».



Source : Saad, Gad (2004). «Applying Evolutionary Psychology in Understanding the Representation of Women in Advertisements», Psychology & Marketing, 21,8.

lundi 6 septembre 2010

Comment certaines marques utilisent les médias sociaux


Le magazine français «Stratégies» présente un dossier sur les marques et les médias sociaux. On le lit surtout pour les exemples concrets d'initiatives prises par Pepsi et Starbucks, notamment. Le marketing, comme disait un ancien professeur, sert à réduire l'écart entre l'acheteur et le vendeur. Les médias sociaux y arriveront-ils ?

mercredi 1 septembre 2010

Arrêtons de dire que la publicité sur le web ne fonctionne pas. Vive la synergie !

Clients, acheteurs médias et tous les intéressés, vous serez heureux d'apprendre, que oui, annoncer sur le web, ça marche. Combien de fois avez-vous entendu un commentaire négatif sur l'efficacité de la publicité Internet ? Comme moi, sans doute trop souvent. Encore mieux, elle peut contribuer à rendre plus efficace la publicité sur des médias traditionnels lorsqu'elle est utilisée en synergie. Il est vrai que les taux de clics sont très faibles, pour ne pas dire anémiques. Mais l'exposition aux bannières, par exemple, laisse des traces et contribue au rappel de la marque et de la publicité. Cette exposition a donc un effet sur le consommateur et son traitement de l'information. Il ne clique pas, mais le message passe.

La synergie publicitaire doit impliquer au moins deux types de médias différents. Leur action combinée est alors plus efficace que chacun pris individuellement. Et en plus, les forces de l'un compensent pour les faiblesses de l'autre. À l'heure où annoncer relève du tour de force, la synergie est rendue presque incontournable. De sérieux modèles peuvent agir comme base d'analyse d'une campagne et même recommander des ajustements quant au % du budget à allouer à chaque média. Plusieurs études ont démontré que le phénomène de synergie existe bel et bien.

Une étude menée en Allemagne, auprès d'un vendeur automobile, a montré que la publicité en ligne avait un effet positif sur les médias traditionnels aussi utilisés lors de la campagne. On parle ici de la télé, de la radio, du magazine et du journal. La campagne Internet a amélioré l'efficacité de la campagne traditionnelle. La synergie s'est produite.

Mais la synergie n'est pas une panacée. Il ne s'agit pas de répéter une même campagne sur tous les médias utilisés. Le message et la création doivent être adaptés au média. À voir certains panneaux ou à entendre certains messages radio, on est encore loin de la bonne compréhension de cette règle de base.

Source: Naik, Prasad A. and Kay Peters (2009), «A Hierarchical Marketing Communications Model of Online and Offline Media Synergies», Journal of Interactive Marketing, 23, 288-299.